Installations olfactives

Mes sculptures en bois ou céramiques renferment des senteurs secrètes. Le spectateur découvre par l’alliance de l’air et de la matière une nouvelle dimension sensorielle.

Mémoires des senteurs

Dans le domaine de la Ferté-Vidame, fief du duc de Saint Simon se tient chaque année La Fête des Livres. Pour la thématique de 2013 « les jardins de la mémoire » j’ai conçu un parcours sensoriel pour le parc du château. Huit céramiques en suspension sur de fins piliers disposés à des points stratégiques du parc.
J’ai cherché à faire revivre l’histoire d’un lieu ainsi que l’histoire personnelle de chaque visiteur par le biais d’une installation olfactive en plein air.
Partir dans le parc de la Ferté-Vidame à la découverte des sculptures en céramique patinée renfermant chacune une senteur. Des sculptures énigmatiques traversées par les notions de vide et d’absence. Il s’agit de partir à la rencontre de « son passé ». Chacun des parfums joue un rôle de « réveil-mémoire ». La forme sculpturale évoque un livre dans laquelle apparaît en négatif l’impression d’un visage. Poser ses mains sur la sculpture, la caresser, approcher son visage. Se plonger dans la sculpture comme dans un livre d’histoire.  Se laisser guider par ses sens. Il ne s’agit pas de mettre un nom sur une odeur mais de vivre une expérience artistique et personnelle en résonance avec le lieu.
L’œuvre évolue en fonction des conditions climatiques, les sculptures respirent.
La lumière, l’hydrométrie, la température changent suivant les jours et les heures. Ces variations climatiques ne modifient pas seulement la perception visuelle mais aussi celle des senteurs. D’ou l’importance de revenir, à différents moments de la journée. Pour à chaque fois vivre une nouvelle expérience.
Sentir, c’est être dans l’illusion d’un passé que l’on croyait oublié, mais qui était enfoui au plus profond de notre mémoire.
Dans un monde où tout va vite, réapprenons à prendre le temps.

Sortilège d’un parcours inspiré

Jean-François Bège, Président des Amis de La Ferté-Vidame 2016
Tous les ans en septembre, une « Fête des livres » rappelle l’imprégnation littéraire de La Ferté-Vidame, fief du Duc de Saint-Simon. Celui-ci a écrit en son domaine l’essentiel de ses fameux Mémoires retraçant la vie sous Louis XIV et la Régence. En 2013, les participants à l’événement ont eu droit à un ravissement supplémentaire. La singulière création de Nathalie Giraud a permis à des milliers de visiteurs de vivre une expérience sensorielle inédite, relayée d’ailleurs par l’une des principales chaînes de la télévision française et encouragée par le Conseil général d’Eure-et-Loir. Avant, pendant et après la « Fête des Livres » , l’artiste a pu offrir les  émotions nées de la rencontre avec huit céramiques en suspension sur des supports disposés aux endroits les plus fréquentés du parc. Pour être admirées ? Mieux, respirées.
Chaque sculpture constituait un « réveil-mémoire », en rappelant de façon énigmatique à la fois un livre et un visage. En l’approchant puis en « plongeant dedans », on retrouvait un parfum lié au passé. Il s’agissait moins de distinguer l’odeur du foin de celle du cuir ou de la craie que de laisser renaître en nous les senteurs enfuies à cause du méli-mélo de nos butins olfactifs quotidiens. Ainsi la mémoire de chacun a pu se raconter à tout le monde, sans parole ni explication, par le seul sortilège de parfums oubliés puis retrouvés. Étonnant parcours, variant au fil des heures et du climat mais suscitant, au final, l’envie d’échanger des impressions, car comme le dit elle-même la créatrice, « les odeurs font parler »… Il y a ainsi des œuvres qui rompent avec la banalité parce qu’elles stimulent plusieurs sens et, plus encore, l’esprit. Baigné d’effluves et de fragrances, celui-ci retrouve une mémoire qui n’est parfois qu’un nouveau détour de l’inspiration, le mot prenant ici toute sa signification.

Ruhezeit abgelaufen (Repos expiré)

Installation lors de l’exposition, Parcours du Souvenir, Cimetière  historique Saint Mathieu, Berlin, 2011

C’est la découverte d’étranges petits panneaux sur certaines tombes Ruhezeit abgelaufen, signifiant que le temps d’une concession arrivait à expiration qui éveilla mon attention et m’inspira pour l’exposition « Parcours du souvenir ». Cela signifie : « Votre période de repos a expiré » et semble interpeller directement la personne qui repose là. J’ai donc décidé de m’adresser aux visiteurs de cette même manière directe.

Un cimetière est avant tout un lieu de mémoire. Souvent nous associons à des êtres chers et aux expériences partagées avec eux certains parfums et odeurs bien précis.
L’installation olfactive dans le cimetière devait réveiller chez le visiteur des souvenirs et des émotions enfouis. Des réceptacles en bois, fixés à des troncs d’arbres et munis d’une ouverture, contenaient  des senteurs. Ils étaient munis d’une ouverture permettant d’y mettre son nez et de les sentir.
Mon souhait : provoquer un sursaut par la perception de ces senteurs. Plaisir, aversion, surprise, joie, répulsion, toutes les réactions étaient possibles. Le but : sortir les visiteurs de leur léthargie émotionnelle. Réactiver des connections cérébrales et faire revivre des souvenirs.
L’installation se composait de huit récipients écrins en bois, fixés sur de fines planches en bois de couleur, répartis dans le cimetière. Leurs réservoirs contenaient différents matériaux ,  supports naturels pour conserver les senteurs. L’ouverture d’un clapet permettait de humer les parfums précieusement conservés. Sur chaque écrin des parties d’un visage, nez et bouche en plâtre patiné étaient appliquées, créant un face à face avec le visiteur.

Céramiques